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J’ai demandé à maman pourquoi il était différent, pourquoi il restait là poser sur le fond de la mer.
Elle avait l’air malheureuse pour lui, les explications sortaient difficilement, venant du plus profond de son cœur. Je sentais son malaise, et dans ma tête d’enfant cette douleur m’envahissait, et cette découverte d’une nouvelle sensation ne me plaisait pas.
J’aimais l’insouciance de ma jeunesse et tout à coup je haïssais la conscience de la vieillesse.
Maman remonta à la surface, me laissant quelques secondes face à ce requin mutilé. L’horreur de cette vision contredisait ma soif d’observation. Je me sentais attiré par les plaies béantes de son dos. Imaginant difficilement que quelques heures voire quelques jours plus tôt, il était comme moi heureux et libre dans les profondeurs de l’océan.
Le sang ne s’écoulait plus, et les cinq trous étaient le souvenir macabre de nageoires magnifiques, préparées pour le porter dans le monde entier, migration obligée pour un voyageur infatigable.
Enfin maman, de nouveau à mes cotés, m'explique que depuis plusieurs années, les hommes sur des petits bateaux, placent dans l’eau des objets qui coincent les requins. Ces derniers sont enlevés de la mer, quelques minutes seulement. Juste le temps nécessaire pour leur trancher leur bien le plus précieux. Les rejetant amputés dans l’eau, incapables de vivre et incapable de mourir, juste avec le droit d’attendre la délivrance.
Le chant des baleines est devenu un hymne à la mort, traversant les océans pour soutenir tout ceux qui comme ce requin n’ont plus d’autres choix que l’agonie. Ne pouvant stopper sa souffrance nous reprenons notre voyage, le laissant prier dans son enfer ou le seul crime admis est d’être innocent.
J’en conclu que les humains n’aiment pas les animaux marins et qu’ils n’ont pas le cœur assez pur pour comprendre que nous sommes une vie.
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